Chaque année, la France perd 20 000 à 30 000 hectares d’espaces naturels, agricoles et forestiers sous la pression des activités humaines. Avec une moyenne de 446m2 de terre artificialisée par personne, la France se place au 4ème rang des pays européens avec le plus haut taux d’artificialisation par habitant. Depuis 1981, les terres artificialisées sont passées de 3 à 5 millions d’hectares (+70%), soit une croissance largement supérieure à celle de la population (+19%).
Cinq millions d’hectares, c’est l’équivalent de la superficie totale de la région Bourgogne France Comté. Sur la période de 2009 à 2019, c’est environ 276 000 hectares de terres qui ont été artificialisées en France métropolitaine, soit l’équivalent, en seulement 10 ans, du département du Rhône.
La loi Climat et résilience du 22 août 2021 a posé un objectif de zéro artificialisation nette (ZAN) à l’horizon de 2050. Elle a également établi un premier objectif intermédiaire de réduction par deux de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers d’ici 2030 par rapport à la consommation mesurée entre 2011 et 2020.
L’artificialisation des sols est à l’origine de plusieurs pressions sur l’environnement :
- amplification des risques d’inondations : la dégradation de la capacité des sols à absorber l’eau par infiltration en raison de leur imperméabilisation. En cas de fortes intempéries, les phénomènes de ruissellement et d’inondation sont donc amplifiés. Les problèmes d’érosion des sols sont amplifiés ;
- perte de la biodiversité par disparition des écosystèmes ou rupture des continuités écologiques. La transformation d’un espace naturel en terrain imperméabilisé, modifie ou fait disparaitre l’habitat des espèces animale ou végétale et peut conduire à leur disparition d’un territoire ;
- réchauffement climatique : un sol artificialisé n’absorbe plus de CO2 et participe donc à la hausse des températures (perte de végétation, changement d’état des sols) ;
- pollutions (métaux lourds, pollution de l’air liée aux transports…) ;
- réduction de la capacité des terres agricoles à nous nourrir : l’artificialisation entraîne une perte de productivité agricole et limite la production alimentaire ;
- renforcement des îlots de chaleur en zone urbaine.
L’artificialisation des sols, une notion intégrée au code de l’urbanisme
Afin de préciser cette notion d’artificialisation des sols, la loi “Climat et résilience” a inscrit dans le droit deux nouvelles définitions :
- l’artificialisation est désormais définie dans le code de l’urbanisme comme étant “l’altération durable de tout ou partie des fonctions écologiques d’un sol, en particulier de ses fonctions biologiques, hydriques et climatiques, ainsi que de son potentiel agronomique par son occupation ou son usage” (article 192 de la loi Climat et résilience) ;
- la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers est entendue comme “la création ou l’extension effective d’espaces urbanisés sur le territoire concerné” (article 194 de la loi Climat et résilience).
Ces définitions sont complétées par un décret publié au Journal officiel du 30 avril 2022 qui précise les surfaces considérées comme “artificialisées” et celles considérées comme “non artificialisées“.
L’objectif de “ZAN des sols” tend donc à interdire toute artificialisation nette des sols sur une période donnée. Cela n’implique pas nécessairement l’arrêt total de l’artificialisation de nouveaux espaces. Celle-ci sera conditionnée à une renaturation à proportion égale d’espaces artificialisés. Tout ce qui sera “pris” sur la nature devra être “rendu“.
Une trajectoire nationale progressive
Concrètement, le respect de la ZAN repose sur la déclinaison des objectifs d’artificialisation dans les documents de planification et d’urbanisme.
Cette trajectoire nationale sera donc déclinée progressivement dans les documents de planification et d’urbanisme
– avant novembre 2024 pour les SRADDET,
– avant février 2027 pour les SCoT,
– avant février 2028 pour les PLU(i) et cartes communales.
Néanmoins les commerces sont déjà impactés par la loi : l’article 215 de la loi Climat et résilience du 22 août 2021 édicte l’interdiction d’implanter ou d’étendre une exploitation commerciale qui se traduirait par une artificialisation des sols, avec cependant la possibilité d’y déroger.
Les projets pouvant faire l’objet d’une dérogation
- Création d’un magasin de commerce de détail ou d’un ensemble commercial d’une surface de vente inférieure à 10 000 m² ;
- Extension de la surface de vente d’un magasin de commerce de détail ou d’un ensemble commercial dès lors que la surface de vente totale dudit magasin ou ensemble commercial reste inférieure à 10 000 m2 ;
- Extension de la surface de vente d’un magasin de commerce de détail ou d’un ensemble commercial ayant déjà atteint le seuil des 10 000 m2 ou devant le dépasser par la réalisation du projet, dans la limite d’une seule extension par magasin ou ensemble commercial et sous réserve que l’extension de la surface de vente soit inférieure à 1 000 m2.
- Pour les projets supérieurs à 10 000m² , le pétitionnaire peut déroger à ce principe, s’il démontre que son projet répond aux conditions suivantes :
- s’insère en continuité avec les espaces urbanisés dans un secteur au type d’urbanisation adéquat ;
- répond aux besoins du territoire ;
- obéit à l’un des critères suivants :
- le projet s’insère dans le secteur d’intervention d’une opération de revitalisation de territoire (ORT) ou dans un quartier prioritaire de la politique de la ville,
- le projet s’insère dans une opération d’aménagement au sein d’un espace déjà urbanisé, afin de favoriser notamment la mixité fonctionnelle du secteur concerné,
- le projet est compensé par la transformation d’un sol artificialisé en sol non artificialisé;
- le projet s’insère au sein d’un secteur d’implantation périphérique ou d’une centralité urbaine identifiés dans le document d’orientation et d’objectifs (DOO) du schéma de cohérence territoriale (SCoT) entré en vigueur avant la publication de la loi n° 2021- 1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets ou au sein d’une zone d’activité commerciale délimitée dans le règlement du plan local d’urbanisme intercommunal entré en vigueur avant la publication de la même loi.
Source : Ministère de l’Écologie et des territoires, vie publique, Carbone 4, Agence d’urbanisme et d’aménagement Toulouse.